Parcours Historique
Depuis sa fondation il y a plus de 800 ans, la Faculté de Médecine de Montpellier demeure un haut lieu scientifique de recherche, de découverte, d’enseignement et de conservation du savoir médical.
L’enseignement médical à Montpellier est né de la pratique, en dehors de tout cadre institutionnel, au début du XIIe siècle. Ancêtre des médecins, un certain André fait son apparition à Montpellier en 1122. L’exercice de la médecine en fit un personnage puissant et un propriétaire foncier considérable. Ce n’est qu’à partir de 1170 qu’un premier noyau de médecins-praticiens-enseignants forme l’embryon de la future Université médicale. Trente ans plus tard, Alexandre Neckam placera Montpellier et Salerne sur un même pied d’égalité. En 1181, un édit de Guilhem VIII proclame la liberté d’enseignement de la Médecine à Montpellier.
Dés 1220, l’enseignement de la médecine à Montpellier sort de sa préhistoire, et le Cardinal Légat Conrad d’Urach concède à l’Universitas medicorum ses premiers statuts. Un cadre institutionnel s’est développé autour de l’enseignement médical, en moins d’un siècle.
Le 26 Octobre 1289, le pape Nicolas IV adresse, depuis Rome, la constitution apostolique « Quia Sapientia » , à tous les docteurs et étudiants de la ville de Montpellier.
Ce texte comporte un préambule dans lequel la Sagesse est entendue dans son sens médiéval, proche de celui des philosophes : un savoir ordonné à des fins spirituelles, au service du beau et du vrai. Étape nécessaire sur le chemin des perfections humaines, elle constitue, sur le plan personnel et pour l’intérêt général, une fin vers laquelle une multitude doit tendre, « illuminant le cœur des hommes et le façonnant à la vertu ».
La présence de ces praticiens, au cœur d’un système international de relations, d’influence et d’échange avec la quasi-totalité du monde connu, est un vecteur de diffusion de la médecine et de l’ensemble des disciplines enseignées dans la cité. Des échanges fructueux entre les enseignants montpelliérains et les autres chercheurs de la chrétienté sont, pour l’Université de Montpellier, source d’un enrichissement considérable. L’apogée de la médecine, en particulier a XIVe siècle, tant par la qualité des maîtres que par les méthodes d’enseignement, doit beaucoup à proximité de Montpellier avec la Cour pontificale, tout autant que l’Université de Paris est redevable à sa proximité avec la Cour de France.
Par sa qualité spécifique, son enseignement associant théorie et pratique, par le caractère « laïc et international » de son recrutement, l’Université de Montpellier s’apparente incontestablement aux principales universités médicales italiennes de Bologne et de Padoue.
Le départ de la papauté avignonnaise se traduit pour Montpellier et ses universités par des année de déclin.
Cette période est marquée par la perte progressive de la tutelle cléricale au profit de l’État avec une faculté qui acquiert ses propres locaux, le Collège Royal de Médecine vers 1450 et de nouvelles règles, édictées par le décret royal de louis XII le 29 août 1498.
Montpellier et Paris partagent une sorte de monopole des études médicales malgré l’émergence de facultés provinciales de rayonnement largement régional comme Caen et le rattachement en 1681 de Strasbourg dont l’audience est surtout germanique. Seules facultés du royaume à dispenser un enseignement régulier de la médecine, Montpellier et Paris sont les deux seules facultés de médecine dont les enseignements sont reconnus et qui se reconnaissent d’ailleurs mutuellement. Bulle de fondation de l’Université Montpelliéraine du Pape Nicolas IV
La richesse de ce texte et son apport pour l’avenir consiste en la reconnaissance de Montpellier et de ses diverses écoles comme « un lieu passant pour convenir merveilleusement à l’étude, dans lequel il y a lieu de promouvoir des foyers d’enseignements » . La conséquence de cette affirmation, née de l’observation d’un siècle d’aventure pré-universitaire, ne pouvait dès lors qu’être l’érection perpétuelle d’un « Studium generale » , c’est-à-dire d’une Université, dans laquelle à l’avenir « les maîtres auront le droit d’enseigner et les étudiants celui d’apprendre, en suivant les cours des Facultés régulièrement établies ». Nicolas IV officialise et encadre des méthodes existantes, nées d’une pratique déjà centenaire. N’innovant en rien, il ne crée pas in abstracto ou ex nihilo des structures artificielles mais, au contraire, vivifie d’antiques et bons usages. Il pacifie, et par là même affermit les bases de l’Université balbutiante, en déterminant le régime des examens et les compétences respectives de chaque autorité en cette matière. Désormais les candidats sont examinés par leurs maîtres, après s’être présentés à l’évêque de Maguelone ou son délégué qui doit les convoquer, afin de s’enquérir de leurs avis. À lui seul appartient d’approuver et admettre les candidats qu’il juge dignes. « Un acte de licence au XIIe siècle » tableau de A. Privat
Apport le plus fondamental de cette constitution apostolique, les licences délivrées à Montpellier donnent au même titre que celle de Bologne ou de Paris, la possibilité d’enseigner et diriger « ubique terrarum », c’est-à-dire en tous lieux.
Les différentes écoles éparses, que le pape Nicolas IV appelle à se regrouper, ne répondent pas toutes de la même manière à cette invitation. L’École de médecine, prétextant ses anciens statuts et pouvant se flatter d’appartenir au groupe très restreint des quatre ou cinq plus anciennes universités européennes, à l’instar de Bologne, Salerne, Paris ou Oxford, attache beaucoup moins d’intérêt à un texte qui, en dehors de la reconnaissance universelle de ses formations, ne fait qu’entériner une situation acquise.
L’Université médicale poursuit simplement son existence, sans réel désir de fusion en « Studium generale » avec les juristes qui prennent le chemin d’une seconde Université.
Montpellier appartient à la première génération des universités médiévales. Désormais, l’arbre universitaire est doté de racines suffisamment puissantes lui permettant d’affronter tous les avenirs.
L’arrivée en Avignon de Clément V en mars 1309, fixant pour près d’un siècle la Curie Apostolique sur le bord du Rhône, intervint vingt ans après que la constitution apostolique eut doté l’Université de Montpellier de statuts spécifiques.
L’École de médecine abrite déjà nombre de maîtres renommés. Des liens privilégiés se nouent rapidement entre la capitale de la Chrétienté et cette Université, déjà un des centres les plus prestigieux de la science médicale. Les Papes d’Avignon, souvent âgés, parfois même usés par les outrages du temps ont trouvé leur entourage habituel dans un vivier de médecins et de juristes, en majorité issus de Montpellier.
L’arrivée des Protestants à la tête de la ville en 1562 s’accompagne de la destruction complète de la tour Sainte-Eulalie, siège de l’Université des droits, qui disparaît momentanément. Le règne du Bon Roi laisse à Montpellier le sentiment d’une renaissance universitaire. L’École de médecine est dotée d’un Jardin des plantes. Volonté d’un roi, il est l’œuvre du Professeur Pierre Richer de Belleval. Premier Jardin Royal de France, antérieur à celui de Paris, il constitue aujourd’hui encore, l’une des plus belles richesses de l’Université de Montpellier.
Le siège de la ville porte un nouveau coup à l’Université qui fut abandonnée alors que la guerre civile fait rage. La restauration universitaire n’eût réellement jamais lieu durant les troubles qui l’affaiblirent considérablement. Cette crise ne fait cependant pas obstacle à l’émergence de plusieurs personnages illustres, médecins et juristes de renom dont la vie marqua l’histoire de leur époque…
Quelques tentatives d’unification sont à signaler, notamment celle du roi Louis XIV, dont la Cour des comptes de Montpellier enregistre des lettres patentes portant union de l’Université de Médecine aux autres Facultés. Cependant, « le Conseil et lettres patentes » du 20 janvier 1687 casse cette union afin que les différentes universités « demeurassent séparées comme elles l’avaient toujours été ».
Les conséquences de la Révolution nuisent beaucoup à la prospérité de la ville marchande qu’était Montpellier. Les remaniements administratifs changent son statut de capitale régionale, en celui moins prestigieux de simple chef-lieu de département. Le corps des juristes, attaché aux traditions et dont l’école est en sommeil, est réservé face aux changements. Mais étudiants et personnels ne sont pas contre-révolutionnaires. Loin d’être réfractaire, le corps médical est enthousiaste.
En 1790, les étudiants en médecine mènent l’assaut de la garnison militaire, la citadelle de la ville étant considérée comme une Bastille à prendre. L’ensemble des professeurs de l’Université des droits refuse courageusement de prêter le serment constitutionnel à une exception près. Le corps médical, professeurs de l’Université et membres de l’Académie de chirurgie le prêtent en 1791. Boisset, certes animateur d’une terreur acharnée en province, spécialement à l’égard des prêtres réfractaires, mène une action efficace d’inspection des hôpitaux et de coordination des services sanitaires. Durant l’An II, les hôpitaux comptent trois fois plus de lits qu’avant la Révolution, au point qu’il est difficile de s’y tenir plus d’un quart d’heure sans se trouver mal.
Par décret du 15 septembre 1793, la Convention met un terme à six siècles d’enseignement, dissout les universités et ferme les écoles. Malgré leur lustre international, Université de médecine, et Académie de chirurgie, créée en 1741, sont balayées.
Mais, un an seulement après ce funeste décret, le 4 décembre 1794 (14 frimaire an III), la Convention décrète la fondation de trois Écoles de Santé.
La Cathédrale Saint-Pierre et la façade sud de l’École de Médecine en 1804 dispensant un enseignement médical et chirurgical. La prestigieuse École de Montpellier renaît de ses cendres aux côtés de Paris et de Strasbourg.En 1795, la Faculté quitte ses locaux anciens et vétustes pour ses locaux actuels, le monastère Saint Benoît. Chaptal y fait construire un théâtre d’anatomie. Médecine et Chirurgie sont réunies.
La période 1794-1803 correspond à une phase féconde de réformation et à l’enseignement des idées scientifiques nouvelles. Cependant la non-délivrance de diplôme liée au libre exercice de la médecine met les écoles de médecine en difficulté.
Le décret du 11 mars 1803 (19 ventôse an XI) soumet l’exercice de la médecine à l’obtention d’un doctorat. La Faculté de Médecine de l’ère moderne trouve alors un cadre institutionnel fixe et put se développer sans crise majeure. La contribution réciproque entre enseignement et pratique hospitalière ne fera désormais que se poursuivre.